mercredi 29 mai 2013

Mariage pour tous : La position d'un élu PS


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Jean-François Debat est le Maire socialiste de Bourg-en-Bresse et vice-président de la région Rhône-Alpes, sa position à l’égard du projet de "Mariage pour tous" mérite d’être entendue :




"Le gouvernement a annoncé le dépôt d’un projet de loi sur le mariage pour tous, traduisant un engagement de campagne du président de la République. J’ai de longue date exprimé mon désaccord avec ce projet, pour des raisons de fond.
S’agissant du droit des couples, l’exigence de reconnaissance par la société et par la loi des couples homosexuels est légitime et je suis favorable à des évolutions de textes. 13 ans après le PACS, après les avancées successives en ce domaine, il reste encore à assurer l’égalité de traitement (par exemple en matière de successions, de pensions de réversion) avec les couples mariés. Au-delà, je pense qu’il est légitime de donner à cet engagement mutuel de deux adultes une reconnaissance plus officielle, par exemple par une cérémonie en mairie, en présence d’un officier de l’état-civil –et non dans le hall d’un tribunal d’instance.
Pourquoi, alors, refuser le « mariage pour tous » ?
Parce que du mariage découlent, automatiquement, les questions de filiation et de parentalité, et que c’est sur cet aspect que j’ai un désaccord de fond. En effet, pour moi, il n’y a pas de droit à l’enfant, mais des droits de l’enfant. Je comprends parfaitement l’aspiration de couples homosexuels stables à élever un enfant, et ne la traite ni avec ironie, ni avec suspicion. Cependant, à mes yeux l’enfant n’est pas un droit, ni pour un couple hétérosexuel, ni pour un couple homosexuel. L’enfant a des droits, il n’est pas un droit pour des adultes quels qu’ils soient. Or, tout enfant a obligatoirement deux parents qui sont de manière tout aussi certaine un homme et une femme et a besoin de pouvoir identifier clairement cette dualité chez ses parents. Alors, me dit on, l’homoparentalité est une réalité aujourd’hui. Sachons d’abord de quoi on parle : oui, aujourd’hui, des milliers d’enfants sont élevés au sein d’un couple homosexuel composé, à la suite d’une séparation ou d’un divorce, d’un de leurs parents et d’une autre personne. Mais il est évident que ces enfants ont un père et une mère et que le conjoint de leur parent n’est pas leur père ou leur mère, ni pour eux, ni aux yeux de la société. Le fait que ce beau parent participe à son éducation n’est évidemment pas choquant, mais sa relation à l’enfant de son conjoint est la même que celle d’un beau parent « classique » : il l’élève, mais n’est pas son père ou sa mère.
Je le pense depuis longtemps :notre droit manque d’un statut du « beau-parent », de cet adulte qui n’est ni un parent, ni un étranger pour l’enfant, qui a une place dans sa vie –et inversement. Pourquoi ne pas créer un statut du beau parent, ouvert à tous les couples recomposés, hétérosexuels comme homosexuels ? Il pourrait être reconnu, avec l’autorisation du parent de l’enfant, à son nouveau conjoint, concrétisant une réalité que tous les couples recomposés connaissent.
Au delà de questions de vie quotidienne (pouvoir aller chercher un enfant à l’école, prendre des décisions en cas d’urgence, etc) ce statut clarifierait ces situations aujourd’hui courantes. Toute autre est la revendication d’accès à l’adoption plénière et à la procréation médicalement assistée (PMA) des couples homosexuels. J’y suis opposé et c’est le principal sujet du débat actuel.
Rappelons d’abord ce qu’est l’adoption plénière : elle consiste, pour la société, à dire à un enfant qui a perdu ses parents naturels quels seront ses parents de remplacement.C’est un droit pour l’enfant, non pour les adoptants. Chacun sait, par ailleurs, qu’un enfant adopté doit assumer la perte de ses parents naturels, parallèlement à son éducation dans sa famille adoptive et que ce n’est jamais facile sur le plan affectif et psychologique –notamment à l’adolescence. Comment imposer à un enfant qui devra gérer le traumatisme d’avoir perdu ses parents un modèle familial où ses deux parents seraient du même sexe ?
Nous savons que la question se pose aussi pour les enfants issus de PMA – qui souhaitent souvent connaître leurs origines. Au nom même de l’égalité des droits, je pose la question : pourquoi un enfant, au motif qu’il est adopté, se verrait-il privé du droit d’avoir lui aussi un papa et une maman ? A mes yeux, l’aspiration d’adultes à être parents ne justifie pas cette atteinte aux droits de l’enfant. Ce débat transcende les clivages politiques, traverse la gauche et la droite. Il mérite mieux que les caricatures ou le « prêt à penser », d’ailleurs présent chez les « pour » comme chez les « contre ».
Il faut qu’il ait lieu avant que des décisions ne soient prises."

Jean-François Debat

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