dimanche 2 septembre 2012

Analyse de la situation économique actuelle

par Charles Gave

Economiste et financier, Charles Gave s'est fait connaitre du grand public en publiant un essai pamphlétaire en 2001 " Des Lions mennés par des ânes "(Edtions Robert Laffont) ou il dénonçait l'Euro et ses fonctionnements monétaires.
Son dernier ouvrage "L'Etat est mort, vive l'état" Editions François Bourin 2009 prévoyait la chutte de la gréce et de l'Espagne.
Il est le fondateur et président de Gavekal research (www.gavekal.com) et Gavekal securities et membre du conseil d'administration de SCORE.

Vers une Dépression en France

La France a un nouveau gouvernement qui présente une caractéristique  qui n’a jamais existé dans aucune autre Démocratie : il ne contient AUCUN ministre issu du secteur privé. Aucun de ses membres n’a jamais dirigé une entreprise, ils ont TOUJOURS, TOUS été payé par le produit de nos impôts…
Je ne suis guère rassuré par le fait que ces fonctionnaires qui n’ont donc aucune idée de ce qu’est la vraie vie soient « conseillés » par des économistes, qui sont également TOUS issus de la fonction publique  en étant TOUS  professeurs/fonctionnaires. (Voir mon précédent article « quand les oints du Seigneur utilisent l’argument  d’autorité »)
Comme tous ces gens sont sans aucun doute de bonne foi et désirent bien faire, je me suis dit qu’il était de mon devoir de procéder à leur éducation, bien déficiente jusqu’ à ce jour. Je ne doute pas que ces lignes vont être portées à la connaissance de ceux qui nous gouvernent  et qu’ils sauront en faire leur miel, acceptant avec la modestie qui les caractérise les conseils de quelqu’un qui a consacré sa vie à analyser ces choses la, sans jamais être payé par quelqu’un d’autre que par ses clients. (il m’est arrive de conseiller des Etats ou des banques centrales. Je lai toujours fait aune seule condition : qu’ils ne me payent rien)
Comme tous les gouvernements depuis 1974 sans exception, ils n’ont  bien sur qu’une idée en tète : LE CHOMAGE et qu’un but,  le réduire.Voila qui est déjà une idée bizarre : le chômage n’a aucun intérêt pour un économiste, la seule chose qui compte c’est l’emploi.
Il ne faut donc pas faire baisser le chômage, qui n’est qu’un résidu mais faire monter l’emploi.
Pour arriver à ce résultat, commençons donc par éliminer les solutions qui n’ont jamais marché.
  • Embaucher des fonctionnaires.
  • Stimuler la consommation, en augmentant par exemple le salaire minimum
  •  Se lancer dans une politique industrielle
  • Créer une banque d’investissement
  • Faire des dépenses d’infrastructure et construire plus de ronds points à  l’entrée de chaque village.
  • Etc…
Le lecteur averti qui aurait lu mon livre « l’Etat est mort, vive l’état”  Francois Bourin Editeur  aura compris que chacune de ces soi disant « solutions » revient à faire croitre la part de l’état dans l’économie, ce qui toujours et partout entrainé une baisse structurelle du taux de croissance et donc une hausse du chômage.(Je me ferai une joie d’envoyer aux lecteurs les graphiques prouvant tout cela et qui se trouvent tous dans l’ouvrage mentionné plus haut)
Après tout, s’il suffisait que l’Etat dépense de l’argent qu’il n’a pas pour qu’il y ait forte croissance, la France aurait du être en boom économique depuis 1973 (date du dernier équilibre budgétaire) et l’Union Soviétique le pays le plus développé du monde, ce qui ne s’est pas produit, à ma connaissance. Mais je n’ai pas été dans les bonnes écoles…
Toutes ces « fausses solutions » entrainent qui plus est une hausse de l’endettement public, ce qui n’est guère conforme aux traités que nous avons signé.
Ayant écarté d’un revers de main ce qui à l’évidence n a jamais marché  et ne marchera jamais, il nous faut maintenant identifier ce qui a toujours marché.
Commençons par poser une petite question socratique toute simple  et cette question n’est pas « comment créer des emplois ? » mais QUI crée ces fameux emplois et comment peut on l’aider ?
A cette question, une réponse et une seule : un type curieux que nos fonctionnaires n’ont jamais croisé sur leur route et dont on ne parle jamais a l’ENA et qui s’appelle un ENTREPRENEUR.
Ce débile profond prend les risques de dépenses certaines , salaires, impôts, loyers, frais divers et variés  qu’il essaie de compenser par des recettes incertaines en vendant ses produits et services à des clients qui ne voient pas très bien pourquoi ils devraient acheter chez lui plutôt qu’ailleurs. La différence entre ses couts-certains- et ses revenus-fort incertains, s’appelle le PROFIT, mot abominable et dont Marx  a fort bien montré le caractère injuste et spoliateur. Forts de cette analyse incontestable dont chacun a pu mesurer le bien fondé en URSS, nos technocrates ont tout fait depuis bien longtemps pour assurer la justice sociale et donc pour que notre suceur de sang ait des profits en baisse constante.
Ils y sont fort bien arrivés, ce dont on ne saurait trop les féliciter.
Depuis 1972, la part des profits dans le PNB n’a cessé de baisser et nous sommes aujourd’hui au plus bas depuis 25 ans au moins.
Remarquons également que chaque fois que se produit une récession en France (période hachurée sur le graphique), la variable d’ajustement, ce sont les profits qui du coup baissent, puisque les ventes des sociétés chutent tandis que leurs couts ne baissent pas.
Je suis sur que le lecteur se sentira conforté dans sa croyance en l’excellence des élites qui nous gouvernent si je lui dis que pendant que le cash flow des sociétés passaient de 30 % du PNB a 22% , la part de l’Etat dans l’économie  passait elle de 30% a 44 %, assurant la justice sociale que chacun peut constater aujourd’hui et que le monde entier nous envie.
Le seul inconvénient est bien sur que les emplois dans l’économie varient en fonction des variations de la rentabilité de mon entrepreneur et que quand sa rentabilité baisse, il licencie, fait faillite-ce qui prouve son incompétence notoire- et cesse en tout cas d’embaucher, comme le montre le graphique suivant.
Quand l’entrepreneur gagne de l’argent, six mois plus tard il embauche, quand il n’en gagne pas, six mois plus tard il débauche…
Salauds de riche qui n’embauche que quand ils gagne de l’argent ! On a honte pour lui !
Et c’est la ou les choses vont se gâter pour « notre cher et vieux pays », comme l’appelait de Gaulle.
L’économie Française est en train de rentrer en récession, comme chacun le sait, et donc les profits des sociétés vont baisse sèchement, comme à chaque fois dans une récession, et six mois après, comme à chaque fois, le nombre d’emplois va donc plonger.
Les recettes fiscales vont fort logiquement s’écrouler tandis que les dépenses de l’Etat vont augmenter très fortement et donc le déficit budgétaire Français va exploser à la hausse comme l’ont fait les déficits Italiens ou Allemands depuis un an.
Le déficit primaire (c’est-à-dire hors paiement des intérêts) va repartir à la hausse à toute allure, pour repasser la barre des -5 % en termes de PNB et devant ce désastre, il est à  craindre que les taux français ne se mettent à monter, comme en Espagne ou en Italie, rendant la situation ingérable puisque la France sera alors dans une trappe à dettes (voir mon article précédent à ce sujet).
Heureusement, comme je ne cesse de le répéter, nous sommes gouvernés par des gens qui ont été dans les meilleures écoles et qui donc vont certainement prendre les bonnes décisions.
Et d’ailleurs, ils ont commencé à  les prendre.  Citons dans une liste qui se veut non exhaustive ce qui a été déjà décidé  :
  1. Un alourdissement de la fiscalité sur les sociétés.
  2. Une augmentation du SMIC, qui augmentera mécaniquement le cout du travail pour tous les employeurs.
  3. Un retour des charges sociales sur les heures supplémentaires, faisant baisser le salaire moyen.
  4. Une imposition plus lourde sur le capital, sur les revenus du capital, sur les plus values en capital et sur les salaires élevés, qui fera baisser le taux d’épargne  français et donc à terme nos investissements.
  5. Une contribution spéciale sur les banques qui va réduire les fonds propres de ces profiteurs et donc renchérir le crédit tout en le rendant moins disponible.
  6. Une taxe spéciale sur les sociétés pétrolières qui va inciter ces dernières à se débarrasser encore plus rapidement de leurs activités en France, en fermant des raffineries et en en licenciant le personnel.
  7. Une quasi- interdiction de licenciement, accompagnée de la mise en examen d’un certain personnel de direction qui avait essayé de préserver la marge de leurs sociétés.
On voit donc que ces mesures vont amener pour mon entrepreneur  et  une baisse de la consommation (donc  à une baisse de ses ventes), et  une hausse de ses couts incompressibles, c’est-à-dire  des charges de sa société. Ses marges, prises dans cet effet de tenaille, vont absolument s’écrouler  (voir Peugeot en ce moment, pour une démonstration en temps réel).
La marge brute d’autofinancement va donc se ratatiner,  à la place de simplement baisserà cause des mesures insensées prises par ce gouvernement  et il existe maintenant une quasi certitude que l’économie de notre pays  rentrera en DEPRESSION  fin 2012 , début 2013 tant le carnage dans les PME va être incroyable cet été, comme l’ont déjà fait l’Espagne et l’Italie qui ont suivi avec le succès que chacun peut voir des politiques tout a fait similaires.
Bref, les hauts fonctionnaires sous l’impulsion des génies profonds tels Trichet ou Delors avaient déjà mis l’économie de notre pays à genoux en imposant cette incroyable stupidité appelée l’Euro.
Cette même classe, qui dispose aujourd’hui d’un pouvoir absolument sans partage et qui est composée de gens au moins aussi incompétents que les deux personnages mentionnés plus haut (ce qui parait impossible, mais est helas la réalité) ont décidé de finir le travail et d’achever de foutre en l’air notre économie puisque maintenant, ils n’ont plus aucun contrepoids.  Tout a l’air bien parti pour qu’ils atteignent le but auquel ils travaillent depuis 1974 et qui semble être de faire de notre pays une zone de non Droit ou le secteur privé n’existera plus.-enfin.
Mon premier livre, publié en 2002,  dans lequel je décrivais dans le détail tout ce qui allait se passer si on continuait à laisser agir ces gens la, s’appelait « Des Lions menés par des Ânes » publié chez Laffont en 2001.
Rétrospectivement,  je trouve que j’ai été trop sévère pour ces pauvres ânes qui ne méritent en rien d’être mis en comparaison avec nos fonctionnaires…
Mais après tout, comme me l’a fait remarquer un fidèle lecteur, âne n’est il pas l’anagramme d’ENA ?
Va donc pour l’âne.

Vers une dépression en France… Partie 2



Dans mon article précédent, je m’essayais à expliquer ce qui est une évidence dans le monde entier, sauf en Corée du Nord, à Cuba, au Venezuela et bien sur en France. Mon propos était d’expliquer que croissance économique et emploi dépendaient d’un acteur qui s’appelait et s’appelle toujours l’entrepreneur et que si la rentabilité de ce personnage venait à baisser, la croissance ralentissait et le chômage augmentait un an après.
Je soulignais les points suivants :
  1. Structurellement, la marge brute d’autofinancement des sociétés produisant en France  (échantillon fort différent des sociétés du CAC 40 qui ont compris il ya longtemps et sont sorties du territoire national) était à un plus bas historique depuis plus de vingt ans, passant de 31% du PNB en 1990 à moins de 24 % aujourd’hui… (Source Insee)
  2. Cycliquement, l’économie Française était en train de rentrer en récession, ce qui voulait dire que les dites sociétés allaient perdre au moins deux points de marge dans les 12 mois qui viennent, comme à chaque fois qu’une récession s’est produite.
  3. Politiquement,  c’était le moment choisi par le nouveau Président et sa majorité pour augmenter massivement les charges sur les dites sociétés, ce qui allait faire baisser de deux points supplémentaires le taux de marge des dites sociétés. Augmenter les impôts sur les sociétés ou sur leurs clients au démarrage d’une récession, cela revient tout simplement a assécher le cash flow des sociétés Françaises au moment ou elles en ont le plus besoin. On a vu le succès de cette politique en Espagne récemment.
La combinaison de ces trois facteurs m’amenait à prévoir un scenario « Espagnol » pour la France, c’est-à-dire à ce que l’économie de notre pays rentre dans ce qu’il est convenu d’appeler une dépression secondaire, un résultat classique des taux de change fixes ou de l’étalon or (voir mon article sur ce sujet dans les archives du site).
En fait, tout mon pessimisme reposait sur une étude sans doute un peu trop rapide des flux  entrant ou sortant des comptes d’exploitation de nos héroïques entrepreneurs Français
Dans la réalité, les choses sont un peu plus compliquées…
Pour faire faillite, il faut être incapable de rembourser sa dette, c’est-à-dire qu’il faut avoir une dette. Quelqu’un qui n’a aucune dette ferme simplement boutique, ce qui n’entraine aucune autre perte que celle du capital qu’il avait mis au début
Je me suis donc posé la question suivante : quelle est la situation financière des entreprises françaises aujourd’hui ? Comme souvent, j’ai trouve la réponse dans les statistiques publiées par l’Insee
Les voici ;
L’Insee publie chaque trimestre une statistique qui donne pour l’ensemble des entreprises françaises le ratio entre le total de leur endettement et la valeur ajoutée que ces sociétés créent. Depuis 1988, ce ratio était en moyenne aux alentours de 110, c’est-à-dire que les sociétés avaient un endettement légèrement supérieur à la valeur ajoutée qu’elles créaient.
Arrive la crise 2009.
Le chiffre d’affaires de nos sociétés s’écroulent, l’activité économique s’étant effondrée. Les sociétés françaises ne peuvent licencier. Pour couvrir leurs charges, elles sont obligées d’emprunter auprès des banques et leur ratio d’endettement passe en trois ans de 110 à 130, les laissant dans une situation financière quasi désespérée.  La valeur ajoutée qu’elles créent est à nouveau en train de s’effondrer, et cette fois ci les banques ne peuvent pas ou ne veulent plus assurer le bouchage du trou.
Que va-t-il se passer ?
Probablement, ce qui s’est déjà passé avec Peugeot, qui a du souffrir de cet effet de ciseau entre chiffre d’affaire qui baisse, endettement excessif, et incapacité de réduire la voilure : les fonds propres deviennent la variable d’ajustement et très rapidement deviennent insuffisants …
Restent comme solution la perte d’indépendance ou la faillite.
Il est donc tout à fait probable que dans les mois qui viennent soient amenées à se déclarer un peu partout des incendies qui vont détruire une bonne partie du capital productif de notre cher et vieux pays.Immanquablement, le chômage va exploser, et avec lui les déficits sociaux et budgétaires.
Tout cela est fort triste, mais comme le disait Bossuet (citation transmise par un lecteur)
Dieu se rit des hommes qui se plaignent des conséquences alors qu’ils en chérissent les causes.”

CG

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