Quelques réflexions à l'intention des Patrick Cohen, Thomas Legrand et autres représentants de la gauche médiatique préoccupés par la question de la droitisation de l'UMP
L'antisionisme d'une certaine gauche semble par contre leur poser moins de problèmes...
Gilles-William Goldnadel
À nouveau, cette semaine, la thématique qui
l'aura emporté médiatiquement, ce n'est pas la crise économique, ce
n'est pas le compromis sur la croissance, ce n'est certainement pas la
situation en Syrie, mais « la guerre des chefs » à droite, et
davantage encore, la polémique sur la « droitisation » qui aurait fait
perdre Nicolas Sarkozy.
Par un paradoxe,
qui ne devrait pas tromper grand monde, ce sont les journaux les plus à
gauche qui semblent se soucier le plus de l'avenir de la droite.
Lundi,
Jean-François Copé, interrogé sur France Inter, faisait presque figure
d'accusé pour justifier le «ni FN, ni gauche» décidé par l'UMP mais
aujourd'hui contesté par François Fillon.
Lorsque
l'actuel patron de l'ancien parti présidentiel a tenté de contester la
moralité de l'alliance entre le PS et le Front de Gauche, il se sera
attiré l'ironie mordante de Patrick Cohen et Thomas Legrand, et même
«l'énervement» du premier, lorsque Copé osa reprocher à Mélenchon ses
sympathies pour Théodorakis, l'antisémite revendiqué.
Comment
! S'indigna Cohen, l'extrême gauche est antiraciste, pas le FN. Quant à
Mélenchon, il n'a jamais rencontré Théodorakis, et je suis énervé par
cet argument. Donnez-nous des faits, exigea Thomas Legrand.
Lorsque, en outre, Jean-François Copé crut devoir reprocher à l'extrême
gauche son antisionisme, il y eut comme un grand et plat silence.
Le problème avec Cohen et Legrand, c'est qu'ils se croient intelligents. Le pire, c'est qu'ils le sont.
Rien
à voir avec un Mermet ou un Paoli. Nous avons affaire au fleuron de la
gauche médiatique française. J'ai même la faiblesse de croire en leur
honnêteté intellectuelle. Je leur reproche seulement d'officier pour le
service public et de faire autant transparaître leurs dilections.
Il
n'est donc peut-être pas totalement vain de leur servir les faits
qu’ils réclament, et, pourquoi pas, quelques thèmes de réflexion
complémentaires.
Oui, Jean-François Copé a raison moralement et factuellement.
Il n'y a pas d'alliance entre droite et droite extrême, alors que la gauche socialiste assume d'autant mieux celle qui la lie à son extrémité, que nul ne se commet à la lui reprocher. Pourtant c'est celle qui n'existe pas qui est obsessionnellement mise en cause.
Il
n'y a pourtant pas de querelle métaphysique à initier sur une poule
socialiste dont l'accouplement consommé oblige désormais l’œuf de pigeon
libéral à réfléchir sur son attitude, s'il ne veut pas continuer à être
gobé.
Sur le fond, j'ai déjà été conduit à écrire dans ces mêmes colonnes, que
la France est l'un des rares pays démocratiques, où le mot
«anticommuniste» est encore considéré comme un gros mot ou une faute de
gout.
Alors que Vichy reste la référence
de l'horreur obligatoire, les souvenirs du goulag, les crimes de Mao, et
les dictatures cubaine, birmane, nord-coréenne, vénézuélienne,
chinoise, pourtant vivantes et mortifères sont autant de vaines
évocations.
Bien sûr, on pourrait objecter -et on
ne manque pas de le faire en ricanant- que le PCF d’aujourd'hui a peu de
rapport avec le parti stalinien d’un Maurice Thorez embrassant
voluptueusement Staline.
À ce compte, cependant, le Front National de 2012,
même relooké incomplètement et imparfaitement par Marine, a encore moins
de rapport avec le fascisme triomphant.
Après
tout, on sort toujours le drapeau rouge et on chante toujours
l’International, Mélenchon célèbre Castro, Chavez et les charmes d’un
troisième tour dans la rue au démocratisme improbable, alors que je ne
sache pas que dans le camp d'en face on arborât le svastika ni même la
francisque ou que l'on entonne encore « Maréchal nous voilà ! ».
Reste
l'antiracisme d'une extrême gauche, célébré non sans candeur par
Patrick Cohen. Il a tout lieu, à mes yeux, d'une circonstance
aggravante.
Mais qui n'est pas antiraciste ?
Si
le Führer renaissait de ses cendres en 2012, je ne doute pas un seul
instant qu’il se dirait, la main sur le cœur, opposé à tout racisme ou à
tout antisémitisme, tout en revendiquant un antisionisme qu’il
confessait déjà avec les mêmes accents misérabilistes utilisés
aujourd'hui par la gauche extrême.
Lorsque Copé
stigmatisait lundi l'antisionisme radical et pathologique des alliés du
PS, ses interlocuteurs semblaient, littéralement, sourds.
Pourtant,
est-il si difficile à entendre, cet accommodement à la violence faite
aux juifs, au lendemain du massacre de Toulouse ou de l'agression de
Villeurbanne ?
Est ce que, précisément, cet
antiracisme obsessif, consubstantiel à la stratégie comme à la tactique
de la gauche extrême, n'est pas de nature à rendre encore plus
scandaleux sa tolérance pour l'antisémitisme du monde arabe, sa
compréhension pour le terrorisme antijuif, son soutien au boycott des
produits du seul État juif, son incroyable dévotion pour un vieil
imposteur qui soutient que l'occupation israélienne est encore pire que
l'occupation nazie ?
En son temps, Jean-Christophe
Rufin avait eu l'intelligence et le courage de dire dans un rapport
commandé puis passé à la trappe par Dominique de Villepin, alors Premier
ministre, que l'antisionisme radical -que seuls les crétins ou les
salauds peuvent confondre avec la critique de la politique d'Israël-
incarnait aujourd'hui l'antisémitisme le plus dangereux.
Alors
oui, Patrick Cohen, lorsque l’antiraciste Mélenchon accepte de publier
fièrement un appel lancé par Mikis Théodorakis, connu depuis des années
pour son antisionisme débridé, et qui revendique aujourd'hui avec
franchise son antisémitisme, cela vaut largement la citation d'une
phrase d'un livre d'un écrivain collaborationniste.
C'est
plutôt ce commode accommodement qui devrait énerver et même incommoder
les antiracistes de France Inter et de la France entière.
Retour
au débat sur la «droitisation». Quelques alliés de François Fillon sont
ravis de jouer les utilités, mais après le match et le résultat connu,
devant des micros extatiques.
Pour le dire
sans trop d'acrimonie, je ne suis pas certain que Messieurs Solere,
Baroin et Mme Koscucio-Morizet, se soient révélés, en la circonstance,
comme des historiens de grande altitude.
Au
premier, mon ami Stéphane Courtois a été contraint de donner, dans ces
mêmes colonnes, quelques mauvais points. Il faut dire que le tombeur de
Claude Guéant l'avait un peu cherché.
Venir expliquer au micro de Jean-Luc Bourdin sur RMC,
que la différence entre l'extrême gauche et l'extrême droite
correspondait à la Résistance et à la Collaboration, relevait
effectivement de la grosse bourde.
Le co-auteur du
«Livre noir du communisme» dut donc rappeler d'où venaient Pierre
Laval, Jacques Doriot et Marcel Deat. Il eut pu ajouter à cette liste
d'hommes de gauche celui d'Angelo Tasca.
Pour
ajouter mon grain de sel sur une plaie inexistante pour cause
d'occultation historique, je renverrai également mes lecteurs, parmi
lesquels je suis sûr de compter M. Solere, à l'excellent ouvrage de
référence de l'historien bien à gauche Simon Epstein, qui a
montré que nombre de militants dreyfusards éminents (pour cause
d'antimilitarisme pacifiste, notamment) ont fait de très convenables
pétainistes.
Ayant causé sans doute chez
certains une surprise qui n'a rien de divin, j'en arrive naturellement à
Charles Maurras qui devient pour d’aucuns la référence pratique lorsque
l'on répugne à embrigader Pétain, Mussolini ou Hitler, usés jusqu'à la
trame trop visible.
Il semblerait que Mme
Kosciusco en ait fait dernièrement un usage quelque peu immodéré sans
que je sois persuadé qu'elle ait relu récemment l'œuvre complète du
fondateur de l'Action Française.
M. Buisson, aurait, selon elle, voulu faire triompher cet antisémite, royaliste, anti républicain revendiqué. Rien que cela.
Question,
en passant, à NKM : Patrick Buisson, en contribuant, de l'aveu même de
celui, à la victoire de Nicolas Sarkozy en 2007, avait-il déjà porté au
pouvoir Charles Maurras ?
Question subsidiaire :
qui, durant la dernière campagne présidentielle, a commis les bévues les
plus signalées : réponse 1 : Nicolas Sarkozy ? (Encore que je n'ai pas
souvenance que les observateurs, pourtant réputés pour leur vigilance
sévère, en aient consigné de notables).
Réponse 2 :
François Fillon ? (J'aide un peu : pensez à sa sortie, dont il dût
s'excuser, sur les viandes halal et casher et pour avoir morigéné
Jeannette Bougrab qui avait osé contester l'existence d'un islamisme
modéré).
En tout état de cause, il faudra que
l'ancienne porte-parole qu’avait cru devoir choisir le président sortant
(qui ne semble pas vouloir appliquer le droit d'inventaire à sa
personne) et M. Baroin harmonisent leurs références historiques.
Ce
dernier ayant décrit M. Buisson comme un antigaulliste primaire, je
rappellerai à nos deux historiens de circonstance, que Charles De Gaulle
était un maurrassien de formation très convenable.
Enfin, quelques questions, pour l'anecdote, autour de la Gay Pride.
Les homosexuels étant, fort heureusement, sortis de leur ghetto, est-il désormais nécessaire, pour affirmer leur normalité de la manifester par l'extravagance ?
L'expression « Gay Pride » est-elle si adéquate ? Personnellement, je ne tire ni honte ni vanité particulière de mon hétérosexualité assumée sereinement.
Enfin,
quitte à occuper la rue, il m’aurait été réconfortant de voir, ne
serait-ce qu'un dixième du nombre des manifestants comptabilisés,
défiler contre les massacres en Syrie.
Hier, 83 Syriens sont morts alors qu'ils participaient à des funérailles.
Qui va les enterrer ?
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