samedi 28 juillet 2012

Tout est dit !


http://elections.lefigaro.fr/presidentielle-2012/2012/06/22/01039-20120622ARTFIG00604-enquete-sur-les-reseaux-de-francois-hollande.php

Avec ça au moins, plus d'excuses ! La réussite est au bout du chemin... (de croix ?)


Enquête sur les réseaux de François Hollande

Fidèles en campagne (de gauche à droite): Pierre Moscovici, Stéphane Le Foll, Aurélie Filipetti, François Hollande, Olivier Faure, Michel Sapin et Faouzi Lamdaoui.

DOSSIER - Depuis le week-end dernier, le président et les siens détiennent tous les pouvoirs institutionnels ainsi que la plupart des exécutifs locaux. Ils disposent aussi de puissants leviers et relais de pouvoir grâce à un vaste réseau de hauts fonctionnaires, de grands patrons, d'intellectuels et de journalistes.


Tout-puissant, François Hollande? Difficile de nier cette réalité: la victoire de la gauche aux législatives et les règles de la Ve République donnent au Président toutes les rênes de l'État, sans compter celles du Sénat et de nombre d'exécutifs locaux. Avec lui et sa majorité, une nouvelle génération prend les commandes, après dix années d'abstinence dans l'opposition. Le président «normal» a promis une république «exemplaire», sans chasse aux sorcières ni copinage abusif. Mais, que ce soit à l'Élysée, dans les ministères, au Palais-Bourbon ou à certains postes sensibles, comme ceux de directeur de la police nationale, de directeur du renseignement intérieur ou de préfet de police de Paris, le nouveau pouvoir a rapidement installé ses fidèles et ses alliés. «C'est logique: François Hollande aime travailler dans la confiance et la loyauté, plaide un de ses amis. Mais il ne doit rien à personne et déteste l'esprit de clan ou de cour.»

Une véritable armada

L'examen détaillé des galaxies qui l'entourent conduit cependant à nuancer la version d'un président sans affidés, d'un outsider sans attaches, simplement sorti du rang grâce au hasard des circonstances. Car, pour emporter la présidentielle face à Nicolas Sarkozy, le candidat socialiste s'est méthodiquement préparé. Il a discrètement bâti, depuis des années, une véritable armada. Un réseau multiforme avec des relais dans tous les milieux - beaucoup d'élus, une grosse dose d'énarques, des amis d'HEC et des PDG, une pincée de Corréziens, un zeste de communicants et de francs-maçons - qui lui a ouvert bien des portes et lui a permis de tenir, dès son entrée en fonction, les rênes de l'État. Ses rivaux, de gauche comme de droite, l'ont toujours sous-estimé. Une erreur de jugement qu'ils doivent corriger aujourd'hui!
La partie visible de ses réseaux repose naturellement sur sa garde rapprochée - les incontournables Michel Sapin, Stéphane Le Foll, Jérôme Cahuzac ou Jean-Yves Le Drian, récompensés par des maroquins. Elle s'est élargie avec le ralliement des principales vedettes des primaires, des amis déçus de DSK et des piliers du PS, tous représentés au sein du gouvernement, y compris l'absente Martine Aubry via la promotion de certains de ses proches. Au-delà de la parité affichée du gouvernement Ayrault, l'Élysée a ainsi verrouillé son emprise sur tous les clans d'un parti vidé de ses cadres, partis rejoindre les cabinets ministériels. Quant aux alliés électoraux, Verts et radicaux, ils ont été placés sous étroite surveillance. Le directeur de cabinet de Cécile Duflot, ministre de l'Égalité du territoire et du Logement, n'est autre que Manuel Flam, un énarque passé par l'Essec, expert des questions environnementales et hollandiste pur sucre. De son côté, la garde des Sceaux, la tempétueuse radicale de gauche Christiane Taubira, a pour principal collaborateur Christian Vigouroux, un conseiller d'État qui a déjà tenu fermement ce poste sous le gouvernement Jospin.

Des «technos» sûrs et expérimentés

Le retour des équipes des cabinets des années Mitterrand et Jospin constitue d'ailleurs un autre trait caractéristique, plus souterrain, de ces réseaux du pouvoir. «La plupart d'entre eux rongeaient leur frein depuis dix ans. Ils se sont mobilisés dès qu'on les a rappelés, retrouvant avec plaisir les bureaux qu'ils occupaient naguère et les huissiers qui les connaissaient dans les ministères», s'amuse un initié. Plusieurs ex-collaborateurs d'Hubert Védrine, qui officiaient avec lui au Quai d'Orsay sous Jospin, occupent des places stratégiques: Paul Jean-Ortiz et Philippe Léglise-Costa pilotent la cellule diplomatique de l'Élysée, Pierre Sellal conserve son poste de secrétaire général du Quai d'Orsay, Denis Pietton dirige le cabinet du ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius, et Pascal Brice conseille Pierre Moscovici à Bercy. «N'y voyez aucun complot de ma part. Ils sont à ces postes parce qu'ils sont bons!», commente Hubert Védrine.
Malgré l'inexpérience de la plupart des nouveaux ministres, la prise en main des principaux postes, de la Défense à l'Intérieur, en passant par Bercy ou Matignon, s'est donc déroulée sans encombres grâce à des «technos» sûrs et expérimentés. La plupart ont d'ailleurs préparé le terrain par petits groupes, pendant des mois, avec l'entourage de François Hollande. Rejoints par une nouvelle génération de hauts fonctionnaires et d'experts, ils se sont, par exemple, retrouvés au sein du think tank socialiste Terra Nova créé en 2008 autour du strauss-kahnien Olivier Ferrand (ENA, HEC). «Nous assumons le rôle de creuset intellectuel et de pépinière pour les cabinets ministériels», témoigne ce dernier, fier de citer plusieurs dizaines de membres des équipes gouvernementales issus de ce club de réflexion. Parmi eux, le banquier Stéphane Bejach, cofondateur du think tank, nommé au cabinet d'Arnaud Montebourg, ou l'énarque Jean-Philippe Thiellay, un ancien conseiller des ministres Martine Aubry, puis Jean-Jack Queyranne et Christian Paul, qui a coordonné le travail d'un millier d'experts de Terra Nova, fournissant notes et rapports, avant de rejoindre Matignon le mois dernier.

Des rendez-vous secrets

Cette armée d'énarques profilés a été renforcée par la mobilisation sans précédent d'une grande partie des vétérans de la fameuse promotion Voltaire (1978-1980) derrière François Hollande. À l'automne dernier, juste après les primaires, ils étaient déjà une quarantaine, réunis au sein d'un informel Club Voltaire sous la houlette de l'association Démocratie 2012, créée par deux «Voltaire», l'ancien député socialiste Jean-Marie Cambacérès et l'avocat Dominique Villemot. Dans le plus grand secret, les membres du Club Voltaire ont été appelés à mettre «leurs compétences et leurs réseaux» au service de Hollande. Certains noms ont été médiatisés, comme ceux de Michel Sapin et de Jean-Pierre Jouyet, fidèles amis du candidat. Ou Pierre-René Lemas et Sylvie Hubac, nommés respectivement secrétaire général de l'Élysée et directrice de cabinet du Président. D'autres «Voltaire», plus effacés, ont aussi été sollicités. Et ils vont soutenir leur ami. «Ma carrière est faite, mais je peux continuer de faire passer des messages, notamment avec les milieux patronaux que je connais bien», confie Dominique Villemot, influent conseiller informel de François Hollande.
Car, c'est une autre surprise, les liens du nouvel élu avec le monde des affaires sont beaucoup plus étroits qu'on ne l'a dit. Certes, François Hollande inquiète sérieusement les grands patrons avec ses dénonciations de la finance, ses promesses d'embauches de fonctionnaires ou son projet de taxation à 75% des revenus au-delà de un million d'euros. Mais le socialiste est aussi présumé pragmatique. «Son diplôme de HEC lui ajoute un peu de crédibilité», plaide son ami lobbyiste Paul Boury, qui a connu Hollande au sein de l'association des diplômés HEC. Pas encore candidat déclaré, Hollande avait d'ailleurs jugé flatteur, en mai 2010, devant un parterre de HEC, d'être comparé à Churchill parce qu'il promettait «de la sueur et des larmes». Et, durant la campagne, il a multiplié les rendez-vous discrets avec les chefs d'entreprise pour tenter de déminer le terrain. Par ailleurs, il a chargé un associé-gérant de Rothschild, Emmanuel Macron, et l'économiste Karine Berger de faire des tournées auprès des investisseurs internationaux détenteurs de dette publique française afin de les rassurer sur ses engagements budgétaires. Depuis, Emmanuel Macron a rejoint l'Élysée comme secrétaire général adjoint et la polytechnicienne Karine Berger, qui vient d'être élue député des Hautes-Alpes, devrait prendre du galon.
Enfin, bien qu'il s'en défende, François Hollande s'est constitué, ces derniers mois, un réseau dans le monde feutré des communicants. Bien sûr, le candidat n'a pas été cornaqué par un «gourou», comme naguère François Mitterrand avec Jacques Séguéla ou Jacques Pilhan. «Ce n'est pas son genre. Il a gardé sa ligne politique et il a parfaitement maîtrisé ses messages», explique l'un des publicitaires qui l'ont côtoyé. Il a aussi pris soin de tenir à distance l'équipe d'Euro-RSCG, Stéphane Fouks en tête, historiquement dévouée à DSK, qui a tenté de revenir dans la course grâce à sa proximité avec Manuel Valls, le directeur de communication de la campagne. Cependant, François Hollande s'est entouré d'une équipe non officielle, constituée notamment de Robert Zarader, fondateur de l'agence Equancy, et de plusieurs dirigeants français du groupe de publicité TBWA et de sa filiale BDDP & Fils. Slogans, tracts, images, messages, argumentaires: tout a été préparé avec les uns et les autres, en lien avec Manuel Valls et son bras droit Christian Gravel, devenu chef du service de presse de l'Élysée. «Nous avons été simplement des prestataires de services pour un candidat qui savait parfaitement ce qu'il voulait», assure Nicolas Bordas, président de TBWA France. Une agence américaine dans les petits papiers du Président? Il ne faut, paraît-il, pas trop le répéter…

Brice Teinturier, sondeur officieux


Très secrètement, selon les sources proches de François Hollande, un consultant a joué un rôle officieux tout au long de la campagne. Il s'agit du sondeur politologue Brice Teinturier, directeur général délégué d'Ipsos France. Expert ès opinions, il a vu plusieurs fois le candidat socialiste pour lui prodiguer ses conseils: «François Hollande a été un client officiel d'Ipsos pendant cette campagne. Nous lui avons fourni des études, naturellement sans parti pris», plaide Teinturier. Mais le sondeur attitré de France Télévisions et de Radio France n'a pas mentionné ses contacts avec Hollande lors des soirées électorales où il a délivré ses estimations et ses commentaires…

Des frères initiés en poste


Les francs-maçons avaient de dignes frères au sein du gouvernement de François Fillon, plutôt proches de la Grande Loge nationale française, orientée à droite. Celui de Jean-Marc Ayrault ne déroge pas à la règle, avec le retour marqué de l'obédience de gauche du Grand Orient de France. Parmi eux, Manuel Valls, ministre de l'Intérieur, Victorin Lurel, chargé de l'Outre-Mer, Jean-Yves le Drian, ministre de la Défense, ou Michel Sapin, ministre du Travail. Le directeur de cabinet du Premier ministre, Christophe Chantepy, y a aussi été initié. Quant à l'ancien Grand Maître du Grand Orient Alain Bauer, ami de Valls et ex-conseiller sécurité de Nicolas Sarkozy, il garde de précieux relais dans les sphères du pouvoir, avec Renaud Vedel Place Beauvau et Cédric Lewandovski, directeur de cabinet à la Défense.

Par Vincent Nouzille

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